Qu'est-ce qu'un congé pour vente ?
Lorsque le propriétaire d’un logement loué souhaite vendre son bien sans transférer le bail du locataire au prochain acheteur, il doit donner congé au locataire. Le congé est la notification par laquelle le propriétaire demande au locataire de quitter les lieux. Il est soumis à un formalisme précis et doit respecter un préavis de six mois (loi n° 89-642 du 6 juillet 1989, art. 15) ou de trois mois si le logement est loué meublé (art. 25-8). Il donne au locataire un droit de préemption de deux mois sur l’achat du logement.
Quelles sont les conditions d’un congé pour vente ?
Le congé pour vente doit respecter plusieurs conditions cumulatives. À défaut, il serait nul et le bail serait automatiquement reconduit à son échéance.
1 - Le congé doit être notifié au locataire au moins six mois avant le terme du bail (trois mois si le logement est meublé). Cette notification peut intervenir par huissier, par LRAR, ou par remise en mains propres contre remise d’un récépissé.
Remarque : Le locataire qui ne souhaite pas acquérir le bien devra quitter les lieux à l’expiration du préavis. Il peut toutefois partir à tout moment pendant la durée de celui-ci, et ne sera redevable que des loyers et charges afférents à la période effective d’occupation du logement.
2 - Le congé doit être communiqué séparément à chaque partie au contrat : en cas de pluralité de locataires, chacun doit recevoir un exemplaire du congé.
3 - La notification doit préciser que le congé est donné aux fins de vendre les lieux.
4 - Le congé doit constituer une offre de vente prioritaire au profit du locataire. À cet effet, il doit comporter le prix de vente projeté ainsi que les conditions de vente et de paiement. Le bailleur est tenu de reproduire, en intégralité, les cinq premiers alinéas de l’art. 15, II, de la loi du 6 juillet 1989. Le locataire bénéficie alors d'un droit de préemption sur le logement; il a deux mois pour accepter l’offre de vente. Son silence vaut refus.
Attention : le fait de délivrer le congé en avance ne fait pas courir le délai de préavis plus tôt. Cela signifie que le congé prend effet à la date à laquelle le locataire aurait dû le recevoir (6 ou 3 mois avant l’expiration du contrat selon le cas).
5 - Le congé doit désigner précisément tous les éléments couverts par le bail et compris dans l’offre de vente, y compris les annexes du logement (cave, parking, sanitaires sur le palier…).
6 - Le propriétaire doit avoir l’intention réelle de vendre les lieux : un congé frauduleux, donné à un prix artificiellement élevé pour dissuader le locataire d’acheter, est nul.
Comment et quand agir ?
Délai d’action : deux mois à compter de la réception du congé
En cas de contestation relative à un congé pour vente, DemanderJustice.com permet au locataire d’effectuer toutes ses démarches en lignes, depuis l’envoi d’une Mise en Cause gratuite à la saisine du Tribunal d’instance géographiquement compétent.
ENVOYER UNE MISE EN CAUSE GRATUITE
Le congé pour vente m'est parvenu moins de 6 mois avant la date d'expiration du bail. Est-il valable malgré tout ?
Non, s’il s’agit d’une location vide. L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le délai de préavis applicable au congé donné par le bailleur est de six mois avant l’échéance du bail. Dès lors, un congé reçu, retiré à la Poste ou signifié par huissier moins de six mois est invalide et donne lieu à un renouvellement du bail à échéance, pour une durée de trois ans.
En revanche, s’il s’agit d’une location meublée, le délai de préavis est de trois mois avant la date d’expiration du bail : le congé sera alors valable.
Je me suis marié(e) ou pacsé(e) au cours du bail et mon époux(se) / mon (ma) partenaire n’a pas reçu le congé pour vente. Est-ce normal ?
Pas si le bailleur a été informé du mariage ou du pacs. En effef, le congé doit être notifié par acte séparé à chaque locataire. Or, les époux ou partenaires sont considérés comme co-titulaires du bail. Dès lors, même si un seul des époux ou des partenaires est signataire du bail, chacun d’eux doit recevoir un congé de la part du propriétaire.
Un congé qui ne serait pas délivré à chacun des locataires se trouverait frappé d’invalidité. C’est au locataire initial de prouver qu’il avait bien informé le bailleur de son mariage ou de son pacs (Cass. civ. 3e, 19 oct. 2005, n°04-17.039).
En revanche, si le locataire s’est marié (ou pacsé) sans en informer le propriétaire, le congé au seul signataire vaudra pour les deux personnes (art. 9-1 de la loi du 6 juillet 1989).
Est-il possible de faire au propriétaire une contre-proposition inférieure au prix de vente qu'il me propose ?
Oui, mais cette contre-proposition est considérée comme un refus de l’offre initiale, entraînant une perte du droit de préemption. Rien n’empêche le propriétaire de négocier avec le locataire qui formule une contre-offre à un prix inférieur, mais le locataire ne sera plus prioritaire pour acquérir le logement.
En revanche, si, après un refus du locataire, le propriétaire fait une offre à un tiers pour un prix inférieur à celui figurant dans le congé, il est tenu de le notifier au locataire. Cette notification a valeur de nouvelle offre de vente à son profit ; le locataire aura un mois pour y répondre.
La proposition de vente du propriétaire me semble excessive. Puis-je la contester ?
Oui. Certains propriétaires font un usage de mauvaise foi du congé pour vente, en proposant au locataire un prix d’achat artificiellement élevé afin de le dissuader d’acheter pour ensuite proposer un prix plus avantageux à un autre acheteur, ou bien sans avoir réellement l’intention de vendre le logement. Ces pratiques frauduleuses sont interdites (Cass. civ. 3e, 5 juil. 1995) et un congé délivré sans intention réelle de vendre est susceptible d’annulation. La charge de la preuve de la fraude pèse sur le locataire (Cass. Civ. 3e, 16 sept. 2009, n°08-13.701).
Ainsi, un prix rédhibitoire et largement supérieur aux prix du marché peut être un indice de fraude - de même que le fait que le bailleur ne cherche pas activement d’acheteur, ou reloue le bien à un loyer bien supérieur quelques temps après le départ du locataire congédié.
Outre l’annulation du congé, le bailleur qui donne un congé frauduleux à son locataire s’expose à devoir lui verser des dommages-intérêts.